Dr.George Simons – problématiques interculturelles en entreprises

george-simons-problematiques-interculturelles-entreprisesDr.George Simons

À ses 76 ans Dr.George Simons a une carrière cinquantenaire (et loin d’être finie) dans la communication interculturelle et le management.

Un des rares américains parlant français, allemand, espagnol et (naturellement) anglais, il comprend aussi le russe, le néerlandais, l’italien et l’indonésien. Diplômé en philosophie, liturgie-théologie et avec un doctorat en dynamiques psychologiques de l’apprentissage en petits groupes.

Inutile de citer tout son CV, car cela ferait l’objet d’un article à lui seul. Il est, néanmoins, intéressant de savoir qu’il est membre de l’académie internationale pour la recherche interculturelle, auteur de livres et publications, membre du conseil d’administration et trésorier de SIETAR (Society for Intercultural Education Training and Research) et membre d’un think tank interculturel.

Depuis 16 ans George Simons habite près de Cannes en France, tout en continuant à voyager dans le monde entier. Lorsque je lui ai posé la question quels pays a-t-il visité – en rigolant il m’a répondu qu’il serait plus simple de lui demander lesquels il n’a pas visité. Sa phrase :

I’m an expatriate but not an ex-patriot.

george-simons-problematiques-interculturelles-entreprises-DiversophyIl avait des missions ponctuelles, en tant que consultant interculturel, au sein des entreprises de toutes origines et toutes tailles à travers le globe. Ses interventions consistaient à aider le staff et le management de ses entreprises à mieux comprendre le fonctionnement d’autres cultures et, ainsi, s’adapter à un mode de fonctionnement autre, plus souple et plus riche.

Depuis 1992 sa marque Diversophy® commercialise des jeux spécialement conçus et élaborés par Mr Simons. C’est un principe de jeux ludiques permettant aux participants de découvrir les faits importants et intéressants sur la culture étudiée, apprendre à communiquer et interagir avec. Parmi ses clients se trouvent de grands groupes internationaux, des ONG, ainsi que les acteurs du système d’enseignement.

 

 

Points forts de l’interview

Dr Simons, pourquoi l’interculturel ?

Cela a commencé dès mon enfance. Mes grands-parents étaient émigrés d’Europe de l’Est et d’Autriche. Or, dès le début j’ai baigné dans la culture d’Europe de l’Est et à la fois dans la culture américaine. En plus de cela, dans la ville où je grandissais, il y avait plusieurs nationalités d’émigrés, ce qui faisait un mélange «éclectiquement très cosmopolite». J’ai été en permanence en contact avec des origines très différentes. Par ailleurs, les langues m’ont toujours intéressé. Mon grand-père parlait 7 langues…

Aussi, aux États-Unis chaque région a sa propre culture et ses propres valeurs, ce qui est du à notre histoire que tout le monde connait. Comme par exemple en Californie, où j’ai vécu 20 ans, presque la moitié de la population a pour langue natale l’espagnol, ainsi souvent lorsqu’on me demande de quel coin des États-Unis je viens – je réponds en plaisantant « du Mexico ». (Rires)

 

Qu’est-ce que l’interculturel pour vous ?

Pour l’anecdote, professionnellement j’ai commencé l’interculturel pas vraiment par la porte d’entrée. À la fin des années 60, en pleine explosion du mouvement féministe, les hommes commençaient à perdre leurs repères dans la communication avec leur femmes, leurs filles, leurs assistantes, etc. Alors, avec un collègue nous avons commencé les séminaires destinés aux hommes “How to love an angry woman” (comment aimer une femme en colère) – les finesses de communication et les différences culturelles (aussi bizarre que cela puisse paraître) entre les 2 sexes. Ça a eu un franc succès – beaucoup d’hommes y ont participé. Ensuite, vers 1978, j’ai commencé à concevoir les programmes de coaching / formation « Comment travailler dans les équipes virtuelles globales ? ». C’était le début de la virtualisation et de globalisation du travail et, donc, de communication distante.

info-21Nota Bene : on peut constater que toutes formations / coaching touchant à l’interculturel (international / global), aux relations hommes-femmes ou au travail virtuel sont liés à une seule science – la communication

Lorsqu’on me demande la définition de la culture en tant que phénomène, je réponds toujours : c’est la conversation que nous menons avec nous-mêmes pour s’adapter et réussir dans notre environnement. Bien qu’aujourd’hui notre environnement soit majoritairement virtuel et beaucoup ”moins humain”.

 

Quels sont vos constats de différences des mentalités, ou de cultures ?

george-simons-anton-malafeev-problematiques-interculturelles-entreprisesHoulà… Combien de téraoctets de mémoire avez-vous dans votre caméra ? (Rires)

J’ai vécu 4 ans aux Pays Bas. Les gens y sont très directs. Un jour j’ai préparé le dîner pour une amie et lorsque je lui ai demandé si elle aimait le plat – la réponse était “Non”. Sans commentaires, sans préambule. Rien. D’un autre côté je savais toujours précisément où j’en étais dans mes relations avec les gens, car tout était très clair. Pas de politesses inutiles à rallonge. D’ailleurs, là-bas, si vous abusez avec les remerciements – les gens vous regardent avec la suspicion (n’y aurait-il pas quelque chose de caché). Et on retrouve aussi cette “directitude” et recherche d’efficacité dans la négociation. Ce sont les gens pragmatiques qui vont droit au but.

Je peux dire que j’avais toujours une boule au ventre dans ce pays, car la communication était trop directe pour moi, en tant qu’anglo-saxon. Contrairement à l’Angleterre, dont j’ai le stéréotype des gens bien éduqués, polis et très diplomates.

En France, lorsque j’ai enseigné dans les universités et écoles de commerce pendant 6-7 ans, j’ai remarqué, par exemple, que les étudiants d’aujourd’hui sont beaucoup plus cosmopolites qu’avant. Ils voyagent beaucoup plus, parlent souvent plusieurs langues et ont une mentalité beaucoup plus ouverte. Et aussi un constat intéressant – les Chinois ne peuvent pas travailler à la fac en présence des Français bavardant constamment entre eux. Ce n’est pas du tout dans leur ADN, leur mode de fonctionnement. Les Chinois sont concentrés et attentifs, et n’aiment pas les distractions en cours. D’ailleurs, j’adore la France, je me sens chez moi ici. Certaines choses me rappellent mon enfance dans la toute petite ville où je suis né aux USA. Par exemple, lorsque je dois prendre le bus en bas de chez moi, je prévois toujours 10 minutes en plus pour y aller, parce que je sais pertinemment que je vais tomber sur un de mes charmants voisins à qui je ne peux pas simplement dire bonjour en passant. Je serai obligé de parler avec pendant quelques minutes. (Rires)

Au Mexique, la négociation au marché est la même qu’au moyen orient. Les Espagnols ont une grande influence arabe dans leur culture. Personnellement j’éprouve un véritable plaisir de marchander, c’est pourquoi j’adore aller au marché au Mexique. Une fois il m’est arrivé de voir mon ami sortir l’argent sans négocier — le vendeur, en voyant cela, lui a dit “je crache sur votre argent”

 

En tant qu’anglo-saxon, qu’est-ce que vous pouvez dire des français ?

Pour moi en France toutes les décisions prennent beaucoup trop de temps. Les administrations sont longues. La prise de décision dans les affaires est longue aussi. Peut-être à cause de la hiérarchie ..?

Mais aux USA il y a autant de hiérarchie. Qu’est-ce qui fait que là-bas le processus de décision est plus rapide ?

Les valeurs ! Chez les Américains la valeur principale est “Now !”. “Time is money”. Tout est construit autour de ça.

 

En quoi consiste le travail d’un interculturaliste ?

L’ancienne approche interculturelle consistait à générer des stéréotypes qui “expliqueraient” les différences de comportements et de mentalités. Mais ça, c’était avant. Les stéréotypes sont nécessaires pour les comparaisons et la compréhension, mais ce n’est pas un outil d’un interculturaliste de nos jours. Dans ce métier il est important d’analyser si tel ou tel stéréotype est vrai dans un cas particulier et dans un contexte précis – d’où la complexité de modélisation de la communication interculturelle. C’est cette méthodologie qui aide à comprendre l’identité culturelle des personnes et, comme fonction, de leurs comportement et du mode de communication. Or, les outils de coaching et/ou de formation vont forcément être la fonction de cette analyse.

La chose dont je suis sûr — le métier d’interculturaliste va continuer à se développer. Car le monde ne veut pas et ne va pas arriver à une seule et unique culture. Il est difficile pour moi aujourd’hui de prédire l’avenir du métier dans 50 ou 100 ans, car le mode de communication virtuelle peut modifier la donne très sérieusement. Mais pour les années à venir l’interculturalisme reste un domaine d’activité nécessaire et plein d’activité.

 

 

Vidéo

LES PROBLÉMATIQUES INTERCULTURELLES EN ENTREPRISE

Extrait de nos Discussions InterCulturelles avec un mini making-of :

On pense à l’avenir et pas au passé, mais si le passé n’est pas réconcilié avec les gens (ou les gens ne sont pas réconciliés avec le passé) – il y aura toujours des problèmes.

 

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