L’épigénétique : l’éthique sociétale & l’émergence culturelle
En dehors de l’importance scientifique et du rôle thérapeutique, cette découverte biologique relativement récente porte un énième coup en dessous de la ceinture à la doctrine créationniste, en confirmant une fois de plus les théories d’évolution de Darwin et de la transformation de Lamarck. L’épigénétique explique beaucoup mieux les mécanismes de la nature que l’Homme explique sa foi et tout ce qu’il a inventé autour.
L’épigénétique
L’épigénétique (du grec επί – au-dessus) — l’ensemble des mécanismes moléculaires qui a lieu au niveau du génome et de la régulation de l’expression des gènes, pouvant être influencés par l’environnement et l’histoire individuelle, ainsi qu’être potentiellement transmissibles d’une génération à l’autre, sans altération de l’ADN, et avec un caractère réversible. (Wikipedia)
Epimutations se produisent par accident, mais aussi sous l’effet de facteurs environnementaux. Le rôle de ces facteurs est très activement étudié dans le développement de maladies chroniques (le diabète de type 2, l’obésité, les cancers). (Le Monde)
“L’épigénétique est l’étude des changements d’activité des gènes – donc des changements de caractères – qui sont transmis au fil des divisions cellulaires (des générations) sans faire appel à des mutations de l’ADN”,
explique Vincent Colot, spécialiste de l’épigénétique des végétaux à l’Institut de biologie de l’Ecole normale supérieure (ENS-CNRS-Inserm, Paris). (Le Monde)
En approfondissant la problématique de l’épigénétique, on découvre un écrin de choses pour réflexion.
Exemple 1.
L’environnement des gènes (c’est aussi les protéines formant les chromosomes, la cellule, le tissu, l’organe, l’individu) et l’ensemble des conditions de vie de l’individu, comme son alimentation, ses activités ou son lieu d’existence — tout ce milieu au sens large, du plan moléculaire au plan écologique, est susceptible de modifier l’expression de nos gènes.
Deux vrais jumeaux (monozygotes), dont le génome est donc strictement identique, ne vont pas nécessairement développer les mêmes comportements, ni déclarer les mêmes maladies au cours de leur existence. Là encore, des modifications épigénétiques peuvent en partie expliquer ces discordances. Les gènes et les cellules sont particulièrement sensibles aux modifications environnementales au cours du développement embryonnaire et des premières années de la vie, mais les effets de l’environnement se produisent tout au long de l’existence. (INSERM – Institut National de la Santé et de la Recherche Médical)
Exemple 2.
L’épigénome, à la différence du patrimoine génétique, est variable. Il dépend de plusieurs facteurs tels que l’âge ou l’environnement. Ainsi, il a été démontré que les niveaux de stress de la mère durant la grossesse pouvaient le modifier en profondeur. (Futura Sciences)
Réflexions autour de l’éthique et des pratiques
Niveaux de stress… Que dire des 90% de la population vivant dans le stress permanent – manque d’argent, pression au travail, transports en commun, pollution (sonore, luminaire, d’air et de la nourriture), indifférence générale entre les individus ? Dorénavant, grâce à la science, on sait que ce mode de vie ne fait pas que dégrader la vie au quotidien. Il laisse aussi une trace dans chacun de nous au niveau moléculaire. Est-ce l’évolution naturelle ou la régression artificielle ?
De l’autre côté, le martellement aux parents — que la mauvaise hygiène de vie (ou tout simplement son absence), l’histoire personnelle et les mauvaises habitudes altèrent funestement leurs cellules ou les dégrade — change quoi que ce soit ? Les parents se pensent adultes et tout permis. Les fumeurs savent pertinemment qu’ils détruisent leur corps, néanmoins continuent à fumer en se trouvant toutes les excuses du monde. Le comble est qu’à cause de la mémoire négative du génome, étant héréditaire, leurs progénitures inexorablement (dans plus au moins 90% des cas) répètent le triste schéma des parents.
Ce serait bien de faire un peu de pédagogie… Parce qu’en termes de causalités le cancer est à seulement 15% d’origine génétique et 85 % d’origine environnementale ou hasardeuse, avec des mutations postérieures à la naissance. D’où l’importance de la prévention, de l’alimentation et de l’hygiène de vie qui resteront toujours les meilleurs traitements anti-cancer.
— Laurent Alexandre (chirurgien urologue, fondateur de Doctissimo en 1999).
L’épigénétique formerait les cultures ?
Le mécanisme épigénétique explique aussi en partie le phénomène sociologique qui est l’émergence culturelle. Cette dernière se produit en fonction de l’environnement social et de l’histoire vécue, au niveau personnel ou collectif. L’ensemble des pratiques, le langage et le mode de vie d’un groupe d’individus détermine une culture qui se transmet avec le lait maternel, comme le veut l’expression populaire qui existe dans plusieurs langues. On comprend donc facilement que l’appartenance à une culture (qu’elle soit du quartier, régionale ou nationale) est la pure fonction de l’environnement et de l’histoire vécue par l’individu en groupe.
L’épigénétique dans la société
Est-ce que le conscient peut contrôler l’adaptation à l’environnement et éviter l’enregistrement de ce changement adaptatif dans le génome? Si oui, serait-il possible de trier les changements positifs et néfastes, afin d’éliminer les indésirables?
Est-ce que ces pilules chimio-magiques seraient capables d’améliorer l’Homme qui est perdu dans sa propre autodestruction et de tout ce qui l’entoure? Ou est-ce qu’au contraire il deviendrait encore moins attentif et responsable ayant les pilules qui “nettoient tout”? Pourront-elles soigner les maladies incurables jusqu’alors ? Cette thérapie, sera-t-elle accessible à tout le monde? À quel prix?