Entreprises de surdoués – 2.0 – digestion des critiques
Une lectrice nous a envoyé sa réaction à l’article Première entreprise de surdoués – l’idée du bénéfice social et sociétal:
Bonjour !
J’ai trouvé votre article très intéressant et la question mérite d’être posée. Par extension, cela impose des questionnements sur la société que nous voulons et la place des “surdoués” dans celle-ci. Toutefois, j’émettrais un bémol à : une entreprise composée uniquement des surdoué, pour plusieurs raisons :
- Ca n’aide pas à mieux intégrer les surdoués dans la société (globale) et à améliorer le regard sur eux (et sur les générations à venir).
- En combattant un modèle (dixit la phrase : tous issus des mêmes écoles), j’ai l’impression que c’est le même modèle qui est finalement recrée (uniquement des surdoués), alors que la mixité et la diversité sont une richesse avant tout, même si pas évidente…
- En mon sens, c’est le regard de la société sur la douance et sur l’atypisme qu’il est nécessaire de développer et de changer : la douance pour sa richesse, son regard, son apport, et ses difficultés. Et dans ce sens, les “surdoués” peuvent/doivent avoir ce rôle de grands influenceurs, voire facilitateurs.
En tous les cas, merci pour votre article très intéressant.
Cdt, Cécile
Nous répondons à ces réflexions-interrogations par le présent article connexe qui, certainement, servira de l’extension à l’article susmentionné.
1. Ca n’aide pas à mieux intégrer les surdoués dans la société (globale) et à améliorer le regard sur eux (et sur les générations à venir).
Pourquoi être scientifique est honorable, être militaire est honorifique, être écrivain ou artiste est notable, mais pourquoi être surdoué et travailler dans une structure spécialement dédiée, élaborée et fonctionnant dans le but d’un entrepreneuriat d’excellence serait ridicule, honteux et/ou péjoratif ???
L’idée et l’essence même de Première entreprise de surdoués – l’idée du bénéfice social et sociétal ont été construits autour du fait que les surdoués ont besoin d’être reconnus par la société et avoir un environnement professionnel propice à leur mode de fonctionnement, correspondant à leurs valeurs et où il pourrait s’exprimer entre les pairs et donner libre court à leur différence et puissance cérébrale.
Ayant ces éléments réunis, dont l’importance psychologique n’est pas des moindres, les surdoués peuvent améliorer leur bien-être dans la vie professionnelle qui, corollairement, peut justement embellir leur intégration dans la societas et bonifier le regard des autres sur la douance.
Le fait d’être intégré professionnellement, d’avoir donc sa place vis-à-vis de son entourage, être reconnu en tant que professionnel et en tant que personne, en outre surdouée, ne peut qu’aider à intégrer les surdoués dans la société globale. Le fait de dire « je travaille dans une entreprise de surdoués » poserait vite le cadre et délimiterait les frontières de moqueries (tant appréciées par ceux qui ne sont pas de la partie, c’est-à-dire les 95-98% de la population). Cela apporterait une légitimité à la personne et à son statut social.
Par conséquent, au contraire, les entreprises de surdoués pourraient faire progresser les choses dans l’approche sociétale, aussi bien que dans l’entreprenariat (par ricochet).
2. En combattant un modèle (dixit la phrase : tous issus des mêmes écoles), j’ai l’impression que c’est le même modèle qui est finalement recrée (uniquement des surdoués), alors que la mixité et la diversité sont une richesse avant tout, même si pas évidente…
Voici la citation d’un très récent article dans les Echos (méritant, par ailleurs, l’attention de tout un chacun en France) :
Il y a beaucoup de réseaux à Paris, des anciens énarques ou polytechniciens aux francs-maçons, et quand vous en faites partie, votre loyauté va à ce groupe. De plus, c’est lui qui définit les critères d’excellence. Donc, on ne va pas chercher ailleurs, on privilégie toujours le même profil. La France se distingue, il faut cesser de penser que le corporatisme s’applique uniquement aux chauffeurs de taxi ou aux notaires, la pratique est au cœur de la société et de sa classe dirigeante.
Le comble vient d’être atteint avec François Hollande, en un certain sens ; pour faire partie du cercle dirigeant, il ne suffit plus d’avoir fait les mêmes écoles que lui, mais aussi la même promotion !
Nous avons besoin d’élites qui ne sortent pas du même moule. Beaucoup de recherches ont montré que, quand vous mélangez des gens de formations différentes et quand il y a frottement des idées, vous avez de meilleurs résultats. Depuis trente ans, une foule d’enquêtes l’a démontré.
Pensez-vous vraiment que regrouper les surdoués rime avec un regroupement des anciens HEC, ou de l’école des Ponts, de l’INSEAD ou encore de l’ENA ?
Loin de là. Etre surdoué ne signifie pas être formaté par une telle ou telle discipline ou idéologie (promue par une école X, ou un groupe d’appartenance), par une approche MBA ou par un milieu social. Les surdoués sont nés avec un cerveau et une sensibilité différente des 95-98% de la population et n’arrive JAMAIS à s’intégrer dans la société – justement parce qu’ils ne sont pas formatables ou, alors, très difficilement !
Or, s’ils ne sont pas formatés et viennent d’horizons très différents, avec l’enseignement différent et, automatiquement, avec des idées différentes – la voici cette mixité et diversité créant la richesse tant nécessaire pour l’innovation, le progrès et le développement.
Par ailleurs, pourquoi les surdoués ne se sentent pas bien en entreprise ? Parce qu’ils n’y sont pas compris par la majorité (exactement comme en dehors de l’entreprise).
Et maintenant imaginez un instant une entreprise de surdoués avec un faible pourcentage de gens non-surdoués – au nom d’une diversité. Il est évident que cette minorité ne se sentira pas du tout dans son élément et sera amenée à supporter en permanence le même mal être que les surdoués dans une entreprise classique. Bien sûr, les variations sont possibles, mais le noyau du problème restera toujours le même : les non-surdoués seront « mis de côté » et, davantage, ne pourront pas suivre la rapidité et la pertinence de la majorité surdouée.
Maintenant imaginez une entreprise surdoués / « normaux » avec un rapport 50/50. Les conflits d’idées et les rivalités de leadership sont tout simplement inévitables. Est-ce un terrain fécond pour une entreprise saine et pérenne ? Vraisemblablement – non !
Quel taux de surdoués et de « normaux » pour un mélange homogène et fonctionnel ? Nul n’en connait la réponse. Cette formule magique n’existe pas. En revanche on connait suffisamment les effets d’entreprises classiques avec des surdoués se comptant sur les doigts d’une main, voire sans surdoués. Alors, pourquoi ne pas en créer une totalement nouvelle élaborée spécialement pour les surdoués ?
3. A mon sens, c’est le regard de la société sur la douance et sur l’atypisme qu’il est nécessaire de développer et de changer : la douance pour sa richesse, son regard, son apport, et ses difficultés. Et dans ce sens, les “surdoués” peuvent/doivent avoir ce rôle de grands influenceurs, voire facilitateurs.
C’est exactement dans ce sens qu’un extrait du rapport du Ministère Hollandais des Affaires Économiques est cité dans l’article initial avec la conclusion : «Nous devons arrêter de regarder les surdoués comme des “monsieur-je-sais-tout” irritants, mais plutôt commencer à tirer parti de ce qu’ils ont à offrir en les encourageant ».
Sachant que dans les pays anglo-saxons l’approche des surdoués est quasi polairement différente de celle en France (et ici on peut rajouter « comme d’habitude ..! »), leur business-modèles accueille les surdoués à bras ouverts et leur donne toutes les chances créant un environnement constructif, afin de tirer parti de ce que les surdoués ont à offrir.
Et comme par hasard, Première entreprise de surdoués – l’idée du bénéfice social et sociétal, étant posté dans tous les pays francophones, a essuyé 95% des critiques en France et nulle part ailleurs. Cherchez la faute …
Réponse récapitulative aux critiques des “surdoués”
Certains ont qualifié l’idée de sectaire (dixit), ce qui a alimenté pas mal de discussions autour du sujet, notamment sur Facebook, avec des comparaisons à la secte Raëlienne.
Ainsi, lorsqu’on a cette définition en tête – on a vraiment du mal à lier ensemble l’idée de l’entreprise de surdoués et les critiques de sectarisme émises à son égard par ceux qui ne savent pas lire ou ne se donnent pas la peine de comprendre avant de s’exprimer.
Bien des critiques étaient persuadés qu’il ne faut pas – dixit – « enfermer les surdoués, d’autant plus que beaucoup sont bourrés de névroses ». Rien que le terme « d’enfermer les surdoués » pousse à croire que les auteurs de cette ineptie n’ayant pas lu l’article ont participé avec rage aux forums de discussions pour anéantir l’idée. Ou, alors, n’ont rien compris en le lisant. Les deux étant parfaitement plausibles.
D’autres ont mis l’accent sur la susceptibilité et les conflits entre les HP (haut potentiel), or forcément et automatiquement une entreprise de surdouées est impossible…
Nous sommes, bien sûr, tous d’accord sur le fait que les non-surdoués sont totalement dépourvus de névroses quelconques, ne sont absolument pas susceptibles et se sentent très bien étant « enfermés » dans des entreprises non-sectaires, en sont heureux et très productifs …
De manière générale, ce qui est curieux – en France lorsqu’on est sur le point d’entreprendre, 95% d’entourage vous dira de ne pas le faire, parce que l’idée n’est pas bonne, parce que l’entrepreneuriat est dur, parce que les temps sont durs, parce qu’un copain d’un copain s’est ramassé en se mettant à son compte, etc. Le pessimisme et la jalousie (de la réussite potentielle ou réelle des autres) omniprésents en France prévaut sur toute idée nouvelle, ambition et/ou aspiration. Certes, c’est mieux de rester dans son marais sans eau courante pouvant apporter la fraîcheur, et continuer à y larver comme avant en se plaignant de son existence quasi pathétique et en critiquant tout sans (au moins) essayer de comprendre.
Aujourd’hui en France on parle d’élites dans tous les médias quotidiennement. Parenthèse : peut-être parce que l’élite française constitue les débris de la vraie élite ayant fui le pays vers les mentalités plus ouvertes ? Parenthèse fermée.
Or, les surdoués devraient faire partie de l’élite (aucunes obligations, bien sûr). Puis qu’ils sont à même de fournir les solutions, les idées et le leadership tellement réclamé de nos jours dans l’hexagone. Et pour ce faire – oui, il est justement nécessaire de remodeler la perception sociétale de la douance (comme beaucoup d’autres choses, d’ailleurs). Ce, à quoi, j’espère, apporteront une contribution notamment ces deux articles.