Votre perception du monde nuit gravement à votre communication

Quel élément influence (naturellement et inextricablement) toute communication ? Et comment peut-on maîtriser la chose ?

La langue est le meilleur ami et le pire ennemi.

L’être humain met 3 ans pour apprendre à parler et le reste de sa vie à fermer sa gueule…

Ces deux citations décrivent explicitement la problématique du présent article-essai et permettent à la fois de rentrer dans le cœur du sujet. En effet, la langue est l’une des composantes essentielles de la communication humaine. Elle nous permet de transmettre le savoir et, ainsi, évoluer; de se faire comprendre à distance sans se voir; d’écrire et ensuite de lire. C’est un conducteur de sens et de sensations pouvant nous faire rire, pleurer, aimer et s’entre-tuer aussi. Nous avons l’habitude de dire que la langue est une arme redoutable. Mais est-ce bien le language qui est un phénomène de communication? Voici un autre point de view.

Communication ≠ Language

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© Marcus Hausser – marcushausser.com

La langue n’est qu’un transmetteur de notre esprit, ou de notre cerveau. C’est un moyen évolué et efficace de véhiculer le “contenu” d’une boîte crânienne vers une autre. Il n’est donc pas sorcier de conclure que l’origine de la communication se tient dans le cerveau jouant le rôle principal de cette-même communication.

Alors, est-ce bien la langue qui est le pire ennemi ? Ou est-ce plutôt notre cerveau, avec son mélange incompréhensible du conscient et de l’inconscient ?

Tout est lié. La communication n’est pas simplement l’art de socialiser et de communiquer. C’est surtout la manifestation, le produit, la dérivée, le fruit d’une réflexion cérébrale — ou de son absence — qui, tel un spectre multi-couleur, retransmet le processus intellectuel qui est lié à une action ou à un fragment de la vie.

Ne rentrons pas dans les dérivations vicieuses de la communication comme le mensonge, la manipulation, l’influence et tant d’autres (le sujet en partie traité dans le chapitre Psy de “Religion 2 : l’athéisme – lucidité ou délit d’opinion ?”), que le cerveau humain maîtrise mieux que la communication correcte et normale.

Manifestations de la communication

Sachant que certaines disputes finissent vraiment mal – pourquoi les couples se disputent souvent ?
D’ordinaire on dit “pour des conneries”. En effet, tout le monde s’en rend compte. La plus grosse part d’engueulades dans le couple provient d’un rien. Presque chacun est capable de faire de l’analyse du couple pour les autres, mais absolument personne n’est capable de mettre de l’ordre dans le sien et ne pas y faire d’erreurs de communication. L’un des deux soulève un prétexte insignifiant (qui s’avère être importante pour lui) et l’autre — vite énervé par cette mesquinerie insignifiante (selon lui) — réagi de manière inconsciente (incompréhension, énervement, cri, claquement de portes…). Le début d’une engueulade.

D’où vient le choc des cultures ? Pourquoi les cultures différentes ont-elles du mal à se comprendre et à interagir de manière soudée et efficace ? 
Le langage véhicule la culture dans laquelle nous baignons. Ainsi, il influence le contenu et la structure de notre modèle du monde. Il est également le moyen par lequel nous faisons connaître notre modèle du monde en communiquant. C’est connu de tous : les cultures asiatiques sont bien différentes de celles en Occident, le Moyen Orient est bien différent aussi des Occidentaux. Alors, que dire des Finlandais ne comprenant pas les Allemands, qui ont des difficultés à comprendre les Français, qui ont eux-mêmes du mal avec les Russes ..?

Pourquoi les parents ont du mal à communiquer avec leurs enfants ? Pourquoi les enfants se sentent incompris par leurs parents ?  Pourquoi les managers ont du mal à motiver les troupes ? Pourquoi les salariés ressentent de l’incompréhension de la part de leur hiérarchie ?
Ainsi, on peut observer les problèmes de communication dans tous les systèmes humains – entreprise, famille, éducation, politique, etc. Car la communication découle naturellement de la perception du monde de chacun de nous. La difficulté est que cette perception / vision du monde varie d’un individu à l’autre. Et le plus intéressant est qu’il y a une différence non-insignifiante entre LE monde et le modèle du monde de chacun de nous. C’est-à-dire l’idée que nous nous faisons du monde qui détermine notre perception et notre expérience de celui-ci.

Création de la perception

SÉLECTION A travers ce mécanisme neurologique, la réalité est perçue par nos 5 sens, qui sont interprétés par le cerveau, afin de recréer cette réalité dans le conscient.
DISTORSION Le conscient modélise et interprète la réalité à base des 5 sens.
GÉNÉRALISATION Reposant sur des expériences du passé, le cerveau crée et utilise les généralisations, afin de comprendre les situations présentes similaires et prédire les situations à venir.
LANGAGE Ensuite, avec certaines déperditions d’informations, le cerveau code la réalité interprétée dans le langage à travers 3 filtres (personnel, culturel, génétique) pour transmettre sa perception du monde à un autre cerveau (un autre individu).

Ainsi, chaque cerveau modélise sa propre réalité. Et la communication n’est qu’un moyen de faire interagir ces modèles du monde qui, par définition, sont aussi variés que les individus sur Terre.

Paradoxes de la communication

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© Marcus Hausser – marcushausser.com

En partant du dernier postulat, on comprends mieux pourquoi la communication s’avère si complexe. En particulier dans la société ou l’intérêt individuel prime au-dessus de tout intérêt commun ou social, bien que les derniers courants à la mode proclament une perte de l’individualisme au profit du collaboratif, social, solidaire et circulaire. Ces courants intellectuels, pourront-ils changer la nature humaine ?

Tout le monde sais que les hommes et les femmes sont différents. Dans un couple les priorités des uns ne sont pas identiques à celles des autres. A la moindre bêtise — pouvant passer inaperçue sans créer de vagues destructrices — aucun des deux ne veut lâcher. Chacun des deux — bourré des préjugés sur le sexe opposé (merci les parents, les amis et les médias) — est persuadé d’avoir raison. “Dans mon modèle du monde il faut que les choses soient ainsi”. Seulement cet “ainsi” est en conflit avec celui de son partenaire.

Les priorités des enfants ne sont pas celles de leurs parents. Les intérêts des dirigeants coïncident rarement avec ceux des employés. Les intérêts du peuple, bien que sensés être représentés par les élus, ne les préoccupent guère, voire ne les intéressent pas du tout.

La communication se heurte à l’absence de souplesse lorsque deux modèles du monde rigides s’entrechoquent. Le tout étant parti d’une “connerie”, les conséquences en peuvent être imprévisibles. Et le comportement des parties prenantes en est la fonction. Dès lors, la communication a besoin de souplesse avant tout mentale. Très souvent une réponse blessante et/ou abaissante ne devrait être qu’un silence. Très souvent, à la place d’une affirmation une simple question peut faire raisonner différemment, adopter un autre point de vue. Nonobstant, la fainéantise de réfléchir au moment crucial sur sa manière de répondre à l’autre (communiquer donc) mène aux conflits pouvant être évités. Mais surtout aux conflits qui sont parfaitement inutiles. Voici un détail méritant l’attention de tout un chacun :

Les limites, sur lesquelles nous butons, ne sont généralement pas dans le monde, mais dans la représentation que nous en avons…

Fonctionnement

Notre dilemme : le conscient et le subconscient de l’Homme modèlent le monde à travers l’ego, considéré en psychologie comme le fondement de la personnalité. Et cet égo — présenté dans le capitalisme comme l’intérêt individuel — est de plus en plus au sommet de la société développée (occidentale donc), avec les conséquences bien connues.

Parmi les premières règles de communication (des écoles différentes) on trouve des choses tellement évidentes qu’elles pourraient être tacites. Mais pourtant elles sont omises dans la communication de tous les jours partout : en entreprise, dans les relations parentales, interculturelles et j’en passe.

Une attitude de confiance et de respect vis-à-vis de soi-même et d’autrui est l’attitude la plus utile pour établir et maintenir une relation constructive.

Chaque fois que c’est possible, il vaut mieux se situer dans un cadre de coopération plutôt que dans un cadre de compétition.

On considère qu’une grande partie de ce que nous communiquons est inconscient et non verbal. Or, bien que notre conscient se rend compte de la nécessité d’une communication souple, réfléchie, coopérative et/ou non dominante, l’inconscient souvent trahit la bonne intention et le dérapage devient quasi inévitable.

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Albert Mehrabian, professeur émérite de psychologie à l’université de Californie (Los Angeles) et spécialiste de la communication, a établi la règle des 7%-38%-55% très utilisée en communication, aussi appelée la règle des 3V, qui signifie que :
• 7% de la communication sont verbaux (par la signification des mots)
• 38% de la communication sont vocaux (intonation et son de la voix)
• 55% de la communication sont visuels (expressions du visage et du langage corporel).

Bien que cette règle ait été abondement critiquée (lire ici), comme toute autre étude ou découverte (lire La résistance de la société aux idées et nouveaux paradigmes), son principe de la communication non-verbale demeure intéressant et mérite d’être pris en considération.

Une autre complication délicate à maîtriser :

C’est notre interlocuteur qui donne son sens aux messages que nous émettons.

Parfois même la meilleure bienveillance du monde qui émane de notre intention peut être mal comprise par l’autre. Car cet autre (et on est tous pareil là-dessus) perçoit la réalité à travers son propre prisme et ses propres filtres (neurologiques, personnels et culturels). Ainsi, la bonne intention peut être mal perçue, interprétée ou tout bonnement pas entendue (voir le mécanisme de Sélection).

Quelques interrogations pour la route

  1. Alors, que dire des partis politiques, où chacun campe sur ses positions et surtout ses intérêts ?
  2. LOLQue dire des femmes qui sont persuadées d’avoir toujours raison en toutes circonstances ? Comme le dit une plaisanterie anglo-saxonne: « Si un homme dit ce qu’il pense dans une forêt et qu’aucune femme ne l’a entendu, a-t-il toujours tort ? ».
  3. Que dire des hommes convaincus de leur droiture systématique ?
  4. Que dire des parents ayant la certitude de bien éduquer leurs enfants ?
  5. Et que dire des enfants persuadés du contraire et voulant toujours s’amuser ?
  6. Que dire du patron et/ou du manager ayant ces raisons d’exiger de ses subordonnés certaines normes ?
  7. Comment expliquer au manager-tyran (et parfois, de surcroît, incompétent) qu’il devrait changer ?
  8. Comment communiquer avec les salariés convaincus que le salaire est une obligation, mais que le travail de qualité n’est qu’une parenthèse ?
  9. Dans quelle langue et comment parler à un fanatique ?
  10. Comment faire passer un changement politique et/ou économique à une nation multiculturelle avec au moins 3-4 générations ?
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© Marcus Hausser – marcushausser.com

Alors, la communication – science complexe ? Ou savoir aîné ?

On peut dire qu’il s’agit d’un savoir complexe englobant des sciences disparates: psychologie, philosophie, neurosciences, langues, biologie, histoire, étique et tant bien d’autres.

Dans un monde complexe d’aujourd’hui et avec la délicatesse du dialogue intra — générationnels / professionnels / sexuels / culturels / etc. — il semblerait que la communication devrait être inculquée dès le plus jeune âge et de manière très explicite. Elle devrait avoir le caractère obligatoire autant que les maths et l’écriture. Et les langues, en tant qu’une des composantes essentielles de la communication, devraient être plus nombreuses et enseignées non pas à partir de 10 ans, mais dès la maternelle — l’âge où les enfants absorbent comme des éponges.

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3 replies
  1. Serge Seguin
    Serge Seguin says:

    Bonjour
    Puisque la langue est à la fois nécessaire à la communication et en détermine aussi les limites, sans compter les autres facteurs d’interprétations, ne serait il pas bénéfique alors qu’une langue universel et neutre, par exemple l’espéranto, soit une langue universellement enseignée ? Quels impacts verriez-vous à cette communauté de langue universelle ?
    Serge de PuissantsContacts

    Répondre
  2. Marie
    Marie says:

    La langue ou plutôt le langage est un acquis évolutif.Il est dû à la station debout qui en déverrouillant les articulations crâniennes a permis l’expansion de l’organe phonatoire.De cette variété nouvelle de sons est né notre langage articule.Impossible chez le singe du fait du rétro prognathisme.
    De ce fait la gestuelle ,les mimiques les grognements,les cris modulés ont laissé la place de plus en plus grande au nouveau mode de communication.
    Il n’ en reste pas moins que la communication n’est pas essentiellement verbale et trouve des compléments indicateurs dans les gestes ,les mimiques ,les postures aussi.
    En situation émotionnelle forte ,en cas de stress ,de souffrance on peut constater le retour de modes plus archaîques qui eux sont universels.
    Alors que le langage primitif s’est érigé en langues diversifiées.Les chercheurs s’intéressent aux structures primitives qui ont constitué le socle commun.

    Répondre

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